Méditation sur le trône.

Quel meilleur moment que cet instant d’abandon, de liquéfaction, de défécation, sans modération, pour méditer sur ce que nous sommes vraiment. Il n'est plus question ici de paillettes, de paraître, de superficialité. Nous sommes dans le dur ou le mollet si je puis me permettre. Tombé l'apparat, tombé l’étiquette, l'image de soi, l'hypocrisie, la fatuité, l'arrogance. Tomber les combines, les mensonges, les intrigues. Tout doit tomber, tomber la culotte, dépouillé de tout ce fatras nous sommes nus au propre comme au figuré. Lorsque nos sphincters libèrent le contenu fétide de nos intestins, nous sommes bien seuls et pourtant au plus près de ce que nous sommes vraiment ; des animaux. Que tu sois riche ou pauvre, puissant ou non, tu en passes par là chaque jour ou peu s'en faut. Difficile moment pour les arrogants, difficile aussi pour les guindés, les constipés, les exclus, difficile pour les malades sur leurs bassins, difficile mais libérateur pour tous, enfin une égalité.

Égalité, ces toilettes fermées, chauffées, éclairées, ces 10 litres d’eau précipités pour évacuer nos excès alimentaires. Quand ce geste, habituel pour nous, sauverait des vies. Egalité, ce parfumeur qui projette sa senteur artificielle pour masquer les naturels, qui de surcroît empoisonne l’air. Ce distributeur de papier doux comme une caresse, lui aussi parfumé, ce siège, plus confortable que bien des bancs. Bancs des accusés où nous pourrions, devrions être jugés pour nos excès, nos égoïsmes, nos surcharges pondérales.

Nos panses trop gonflées, malades de trop manger, sourdes aux cris des affamés, des immigrés qui n’ont pour évacuer, au mieux qu’un seau qu’il faudra vider, qu’un coin de dune et pas de papier, qu’un terre-plein sans rien pour s’abriter, Accroupis, les tripes n’ayant rien à régurgiter parce que sous alimentées. Egalité où es-tu ? Dieux où êtes vous ? Si, comme nos curés à l’embonpoint démesuré, vous demeurez murés dans le silence, dans votre corpulence, dans votre adiposité, ne soyez pas surpris de n’avoir plus aucune audience. Vos églises se sont vidées comme autant d’intestins non alimentés. Et nos démocraties ou plus exactement nos ploutocraties qui affament sciemment les pays-sous développés, où est elle l’égalité ? Avec un papier doux et parfumé nous la recouvrons, la cachons à nos yeux de peur d’être importunés.