Temporalité

La vie ne dure pas, tout le monde sait cela. Les sages disent, peut-être demain n'existera pas, aucun de nous n'y croit. Bien que nous sachions que c'est la plus vraie des vérités, toujours vérifiée. Certains sont prêts à croire des histoires rocambolesques, que tous les écrivains et poètes réunis n'oseraient publier. Certains croient en Dieu, à l’immortalité, pas à la mort. Nous refoulons la mort. Faut-il que nous soyons ! Faut-il que nous chérissions à ce point la vie, pour ne point vouloir la mort ! Que connaissons-nous de plus beau, nous ne connaissons qu'elle et à travers elle nous connaissons tout, sauf la mort, ce mystère non éclairci. Puisque nous aimons à ce point la vie, pourquoi ne pas la vivre pleinement. Pourquoi la parasiter par tous ces questionnements, serais-je le premier, serais-je le plus beau, serais-je le plus intelligent, serais-je le plus fort. Est-ce cela vivre sainement, sereinement ? J'y vois plutôt, autant d’ombres que de questions, j'y vois d'autant moins que la lumière est tamisée comme un nuage qui fait obscurité. Mais alors, faut-il ne pas se poser de questions, vivre comme on nous l'a prescrit. Ne nous y trompons pas, nous n’avons pas le libre arbitre, nous vivons comme on nous l'ordonne. Ne croyez pas que vous ayez le choix. Pourquoi est-on catholiques, musulmans ou juifs. Bêtement, parce que nous ne choisissons pas notre lieu de naissance. Se pourrait-il que moi Jp, né dans une autre contrée, n'aurais pas notion d’égalité entre femmes et hommes, se pourrait-il que je sois polygame, que j’approuve l'excision. La réponse, aussi cruelle soit-elle, est oui, Jp, pourrait être un autre. La vie nous est infligée, pour en arriver à cette conclusion, il faut bien se poser questions.

- Tu te contredis, tu viens d'affirmer qu'il ne fallait pas s’interroger.

- Il y a questions et questions. À quoi bon savoir qu'on est le plus beau, même si cela était, en quoi en es-tu responsable. À quoi bon, être et vouloir être plus que l'autre, ceci, peut-être une bonne question. Bien sûr qu'il faut réfléchir, philosopher (exercice de la sagesse) nous avons cette faculté, autant l'utiliser. La vie est courte même si l'on vit cent ans. J'en suis d'autant plus conscient que tous les jours, pour prolonger ma vie, j'avale depuis dix ans des médicaments. La méditation apprend la temporalité de toute chose et donc de la vie. Souvent je dis : faisons-le aujourd'hui, qui sait ? Que sera demain, y aura-t-il un demain, verrons nous demain ?

Hier, il s'en est fallu d'un doigt, plus exactement d'un cheveu et encore d'un très fin, pour que notre vie soit bouleversée. Anne, en traversant n'a pas vu ce camion surgissant. J'ai cru qu'elle allait être happée, j'aurais assisté impuissant, j'aurais vu, vécu en direct ce qu'aucun ne voudrait voir, j'aurais vu la mort, pas n’importe laquelle de surcroît. Anne aurait pu trépasser. J'allais dire, Dieu merci je ne l'ai pas vue, voyez comme je suis formaté, moi, qui ai rejeté depuis très longtemps le dieu qu'on m'a imposé. Attention, je ne nie pas l'existence d'un Dieu, comment peut-on nier quelque chose que l'on ne connaît pas. Je renie celui qu'on m'a imposé, en me baptisant alors que j'étais innocent, ce baptême, fourberie imposée pour faire grossir les statistiques d’un clocher. Mais là je m'enflamme, il y a tant à dire. J'ai subi trop longtemps ce formatage étant enfant, j'ai été tellement bien formé, alors, qu'ayant rejeté ces croyances, je les ai quand même imposé à mes deux enfants en les faisant baptisés. Mon fils, ne voulant pas être récupéré politiquement, s'est fait débaptiser et moi ne saurais tarder. Soyons présent, soyons conscient, soyons vivant, la mort guette. La mort préfère et c’est tant mieux, les petits vieux, les racornis, les gâteux, mais, attention la chair fraîche est aussi à son menu. Soyez s’il vous plait vigilant, la vie est si belle et si courte, profitons-en pleinement. Aujourd'hui Anne et moi savourons encore mieux la vie !